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La femme musulmane entre usurpation des droits et stéréotypes… (partie 1)

Ce titre résume bien la problématique de la femme musulmane telle qu’elle est vécue aujourd’hui… Une femme musulmane, prise en otage entre deux mondes…Un monde intérieur, musulman, dans lequel on lui a usurpé beaucoup de ses droits- parfois même tous ses droits- et un monde extérieur, non musulman où elle est représentée comme étant l’archétype par excellence de la femme opprimée et où on l’a condamne sans merci à une représentation stéréotypée implacable…

Tandis qu’à l’intérieur des sociétés musulmanes on lui a confisqué ses droits au nom de l’islam durant des siècles d’histoire, à l’extérieur on continue à instrumentaliser à outrance cette image de « femme victime » pour justifier les théories les plus dramatiques, comme celles du choc des civilisations, de l’incompatibilité de l’islam avec la modernité, du monde civilisé et barbare, du bien et du mal…Bref, selon cette vision manichéenne très à la mode qui poussera la rhétorique jusqu’à faire de la salvation de ces pauvres femmes une affaire d’Etat comme cela a été l’exemple avec les femmes afghanes ou comme c’est aujourd’hui le cas avec le projet- très américain- du Grand Moyen-Orient qui « proposerait » avec les réformes politiques radicales, une révision sérieuse du statut de la femme musulmane !!

Le tapage médiatique autour donc de ce thème de la femme musulmane victime de tous les maux est intarissable et il devient à la longue extrêmement difficile de faire la part des choses entre le vrai et le faux, entre la réalité et l’imaginaire…

Il est intéressant de voir comment dans le monde musulman on répond à ces accusations par des allégations catégoriques réfutant cet état de fait et argumentant, toujours selon un mode de réaction passionnel, que les femmes musulmanes ont tous les droits en islam et que toutes ces « tentatives de libération » de la femme, promulguées par certains courants, sont en fait des tentatives de déstabilisation et d’acculturation qui n’ont pour but que de rendre les sociétés musulmanes permissives et amorales, à l’image de ce qu’est aujourd’hui l’Occident aux yeux de nombreux musulmans…Toujours cette manie de réagir selon le mode de la réactivité identitaire qui fausse tous les débats et qui empêche toute tentative réelle de dialogue – et de réformes surtout- et qui cela dit en passant, nous permet de fermer les yeux sur beaucoup de transgressions au nom de la « préservation de l’identité musulmane ».

A ce niveau là, il faudrait se mettre d’accord sur un point très important : parmi toutes les critiques faites inlassablement à l’islam et aux musulmans, celle concernant le statut de la femme, malgré sa médiatisation exagérée et parfois son instrumentalisation malhonnête, se trouve être la plus avérée, la plus juste et la plus sensée… Il est indiscutable que le constat d’une profonde et réelle discrimination à l’encontre des femmes musulmanes est réel, il est même parfois accablant…Cependant, il est aussi tout important de différencier entre le fait culturel et l’essence d’une religion, entre un message spirituel et ses diverses interprétations : on accuse trop vite le Coran et l’islam en tant que religion de porter en eux les prémices de la discrimination des femmes, de l’incitation à la violence ou de l’application des châtiments corporels les plus barbares…

Or une lecture intelligente du message coranique ne révèle nulle part des manœuvres discriminatoires diaboliques… ou une supériorité despotique de l’homme au détriment de la femme telles qu’elles sont propagées de manière profuse. Bien au contraire, le texte nous dévoile d’une manière très subtile l’égalité entre les hommes et femmes dans leur humanité…Une égalité spirituelle qui émane le long des versets comme un rappel sans cesse reformulé et que malheureusement la réalité des sociétés islamiques trahit tous les jours que Dieu fait…

Le vrai problème qui se pose en fait ce n’est pas tant le Coran mais ce que l’on a fait de ce Coran à travers des siècles et des siècles de lecture et d’interprétations sexistes envers la femme. Des interprétations rigoristes et complètement fermées du religieux qui ont légitimé durant toute l’histoire musulmane, volontairement ou non, une véritable discrimination à l’encontre des femmes…Car on doit se mettre aussi d’accord sur une chose : il est très facile de retrouver des arguments coraniques qui infériorisent la femme -comme dans tout texte religieux que ce soit la Bible ou la Torah- quand on pratique une lecture littérale, statique et qui ne prend pas en compte la dynamique historique des époques de la révélation…

Je voudrais pour étayer un peu mon propos vous citer quelques exemples de droits acquis en islam en faveur de la femme -depuis 14 siècles- et qui lui ont été usurpés du fait de la logique de l’interprétation machiste des textes :

Droits humains où l’égalité spirituelle en islam : Le Coran est formel quant à l’égalité de la femme avec l’homme concernant leur humanité. On retrouve à cet égard deux notions qui confirment cette égalité spirituelle :

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  • Le concept de la création de l’être humain : selon la vision coranique il n’y a pas de point de vue humain profond de concept « Homme » ou « femme », les deux selon le Coran représente une seule vérité celle de « l’âme humaine ». La création originelle est celle d’une humanité indifférenciée qui transcende le genre. Le Coran évoque le terme d’Adam qui en hébreu veut dire « l’espèce humaine » et n’évoque à aucun moment celui d’Eve. Ce qui traduit une volonté de description de la création humaine à partir d’une origine unique. Cependant, il est étonnant de voir comment des textes religieux d’exégèse sensés expliciter la création font mention d’Eve et sa fameuse création à partir d’une côte d’Adam alors que nulle part dans le Coran il n’est question de cette notion…Or ce genre de textes, à l’encontre de l’égalité humaine de la création comme voulue par le Coran, vont servir d’ argumentaire quant à une supposée infériorité structurelle de la femme et vont ainsi proliférer à travers l’histoire islamique sous l’influence de la tradition religieuse judéo-chrétienne d’une part et de la lecture misogyne arabo-bédouine d’autre part…

  • L’absence de toute notion de péché originel : il n’existe dans le Coran aucune notion de péché originel et encore moins d’une quelconque responsabilité de la femme liée à ce péché contrairement aux traditions ultérieures. On sait combien ce concept a été instrumentalisé en défaveur de la femme et comment pendant longtemps il a été à l’origine de toute une culture de répression envers la femme à travers l’histoire de l’humanité. Le coran parle plutôt d’une responsabilité commune ou partagée des deux sexes, responsabilité pardonnée et absoute par Dieu. Il est cependant aberrant de voir comment les musulmans ont une conception erronée à ce sujet là puisqu’ils continuent de valoriser la présupposée responsabilité de la femme dans cet acte originel.

Droit au savoir et à la connaissance :

La tradition sacrée islamique est explicite quant à l’obligation du musulman et musulmane au savoir et à l’éducation. Le texte coranique est très clair et l’énonce à plusieurs reprises à travers divers versets qui incitent à la recherche de la science et à l’instruction…En effet, la quête du savoir et formulée en islam comme une quête de Dieu et de Ses signes à travers la création…La tradition prophétique confirme cette volonté par le célèbre hadith : la recherche du savoir est une obligation pour tout musulman et musulmane…L’éducation est fondatrice de l’identité musulmane et le meilleur exemple reste sans aucun doute celui de l’épouse du prophète, Aicha, qui sera l’une des plus grandes savantes que l’islam ait connu et dont le savoir est transmis de générations en générations jusqu’à de nos jours dans les plus grandes universités islamiques du monde…Or l’histoire musulmane confirme là aussi « l’usurpation de ce droit » puisque l’on va au nom du religieux refuser aux femmes musulmanes ce droit pendant des siècles d’histoire…La réalité aujourd’hui des sociétés musulmanes est là pour le confirmer : le taux d’analphabétisme des femmes dans les pays musulmans reste parmi les plus élevés au monde … L’ignorance entretenue des femmes, volontairement maintenue dans les sociétés islamiques, reflète l’une des plus grandes trahisons du message de l’islam…

Droits politiques :

Il est étonnant pour celui qui lit l’histoire islamique des premiers temps de la révélation de voir à quel point la participation des femmes était évidente dans le champ sociopolitique…Le droit à l’élection d’un représentant politique a été un acte voulu et défendu par le prophète et la participation des femmes a été un tournant important dans la gestion de la première cité islamique…L’histoire révèle comment elles ont été très nombreuses à participer activement aux différents actes politiques de l’époque ce qui a été déterminant pour la naissance de la première communauté de l’islam…Elles seront nombreuses à se sacrifier par amour à la cause de l’islam et à son exigence de justice et leurs participation sera totale : elles vont subir des tortures du fait de leurs choix religieux, elles vont s’exiler politiquement, elles vont financer par leurs propres moyens les différents projets politiques de l’islam…Le Coran cite entre autres et à plusieurs reprises l’exemple de la reine de Saba comme chef d’état politique douée de sagesse et d’intelligence…Cependant, l’exégèse masculine va « survoler » le rôle précurseur de cette femme en le réfutant le plus souvent ou en le considérant comme un simple « incident de parcours » et ce dans le meilleur des cas !! On refusera aux femmes le droit au pouvoir politique en faisant fi de toutes les données coraniques et en se basant sur un seul Hadith formulé dans un contexte très particulier…Encore une fois, la lecture machiste va essayer d’évincer toute présence féminine de l’histoire de l’islam et l’on va assister en terre d’islam – bien évidemment toujours au nom du religieux- à une exclusion institutionnalisée de la femme de tout champ politique…La preuve de cette régression en est qu’aujourd’hui dans de nombreux pays du golfe par exemple même le droit de vote est interdit aux femmes ….

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